Les débuts du Cap de Bonne Espérance (2)
Après Jan van Riebeeck (1652-1662), huit commandants se succédèrent au Cap en 17 ans, mais celui qui nous intéresse pour les Huguenots, c’est Simon van der Stel (mandat 1679 – 1699)
1652–1662: Jan van Riebeeck
1662–1666: Zacharias Wagenaer
1666–1668: Cornelis van Quaelberg
1668–1670: Jacob Borghost
1670–1671: Pieter Hackius (Gouverneur)
1672–1672: Albert van Breugel (Suppléant)
1672–1676: Isbrand Godske (Gouverneur)
1676–1678: Johan Bax van Herenthals
1678–1679: Hendrik Crudop(Suppléant)
Simon van der Stel
Simon van der Stel est né en mer, à bord du navire “ Le Cappel”. Ses parents Adrian van der Stel et Maria Leviens étaient en route pour l’Ile Maurice où Adrian van der Stel fut le premier Commandant de la VOC de 1679 à 1691. Maria était la fille de Hendrik Lievens de Batavia (Jakarta) et de Monica de Goa, une ancienne esclave d’origine indienne. A l’époque, il était courant que les hommes de la Compagnie épousent des femmes ‘’ indigènes ou non-européennes ‘’.Simon van der Stel devint de facto la première personne née en dehors de l’Europe et de parenté mixte à être nommé Commandant et ensuite Gouverneur du Cap. A l’âge de 20ans, il épousa en Hollande Johanna Jacoba Six, fille d’un membre éminent de la VOC, Willem Six.
Pendant sa tenure au Cap, Van der Stel entreprit l’expansion territoriale au-delà de la Montagne de la Table. La Colonie s’étendit jusqu’à Stellenbosch, Drakentsein, Paarl, Franschoek et les vallées de Tygeberg et Wagenmakers. Ces développements étaient devenus nécessaires pour faciliter l’installation des nouveaux fermiers, les ‘’ Free Burghers ‘’ qui fournissaient la Compagnie en blé et légumes. Dès 1680 le commandant fut confronté à la difficulté de fournir assez de viande pour les besoins de la Compagnie (3000 à 4000 moutons). Jusqu’alors le Commandant faisait commerce avec les Khokhoi pour acquérir cheptel et viande. Il arriva malheureusement que les méthodes employées pour obtenir le bétail nécessaire soient souvent violentes. En 1693, Chainouqua Captain Dorha (appelé Klaas par les Hollandais) refusa de fournir du bétail à la colonie. En réponse Van der Stel, autorisa une attaque en règle sur le’’ Kraal’’ de Dorha avec une armée de 200 soldats et de ‘’ freeburghers’’. Dorha fut capturé, beaucoup de ses compagnons furent tués lors de la rafle, et tout le bétail fut capturé. Des rafles sur le cheptel devinrent une occurrence ordinaire. Pendant son administration il y en eu environ 40 et l’effet sur les troupeaux des Khoikhoi fut désastreux.
Village Khoikhoi
Paradoxalement, Van der Stel décida d’empêcher les ‘’Free Burghers’’ de commercer directement avec les Khokhoi. Il pensait que si les colons avaient un accès direct au cheptel, la quantité de bétail diminuerait trop vite et il n’y aurait plus assez de viande. De plus, Van der Stel craignait que ces activités commerciales fassent monter les prix. Donc le commerce du bétail fut exclusivement réservé à la Compagnie. Les personnes trouvées coupables de commerce illégal furent sévèrement punies, battues, marquées au fer rouge et dans certains cas, bannies.
Durant sa tenure, Van der Stel entreprit la construction de la nouvelle ’’Slave Lodge‘’, la ”Maison des Esclaves” (maintenant Le Musée Iziko) où étaient logés les esclaves travaillant pour la VOC. Il y avait également une école où les enfants des esclaves étaient scolarisés jusqu’à l’âge de 12ans.
Le Musée Iziko (ancienne Maison des Esclaves)
L’arrivée des Huguenots au Cap de 1688 à 1689 fut certainement un des faits marquants du mandat de Van der Stel. Il réserva des terres pour l’implantation des Huguenots à Franschoek (Le coin Français) et dans le Drakenstein (maintenant la ville de Paarl). Il ordonna également que les français soient dispersés parmi les autres fermiers Hollandais. Il pensait ainsi que l’intégration serait plus rapide et que les nouveaux venus apprendraient plus vite le langage et les mœurs locaux et prendraient ainsi leur place dans la nation Hollandaise. Cela peut surprendre avec le recul car les plupart des Huguenots avaient déjà passé un certain temps aux Pays-Bas. Bien que Van der Stel ait eu une ascendance mixte, il grandit et fut éduqué dans une identité Hollandaise qui était très nationaliste. C’est ainsi que lorsqu’en 1690, les français résistèrent et réclamèrent leur propre église (que la VOC leur accordèrent le 6 Décembre 1690), il décrivit les Huguenots comme ‘’the most ungrateful people on the face of the earth ‘’. Ce n’était pas la première fois que les vues de Van der Stel et celles du consistoire de la VOC s’affrontaient. La direction avait en effet vivement critiqué les mauvais traitements que Van der Stel appliquait aux colons qui faisaient du commerce illégal avec les Khoikhoi. Quand son fils Willem Adriaan van der Stel lui succéda, il l’avertit de ne pas donner trop d’attention aux inspecteurs de la VOC, étant donné qu’ils n’étaient pas vraiment au courant de la vie sur place.
Les Huguenots sont arrivés principalement en 1688 et 1689.
Il y en avait eu quelques-uns auparavant mais ils avaient atteint le Cap individuellement et non pas dans le programme d’émigrants (Settlers) organisé par la VOC. Il y eut en particulier Dominique de Chavonnes, un officier militaire qui s’était engagé dans la VOC. Egalement un François Villion, carrossier de son état arriva au Cap en 1671. Le 17 mai 1676, Il épousa Cornélia Campenaar une jeune fille originaire de Middelburg aux Pays-Bas. En 1682, il reçut les titres de la ferme ‘’ Ida Valley ‘’ près de Stellenbosch . Il exploita ces terres jusqu’à sa mort en 1689. Le vignoble existe toujours en 2018 sous le nom de Glenelly et est la propriété d’une famille française. En 1683 arrivèrent également Pierre le Febre et en 1686 les frères du Toit, François et Guillaume.
Donc la scène est posée et le premier bateau est prêt à partir
Le Voorschoten est arrivé à Saldanha le 25 Avril 1688 et au Cap le 13 Avril, ayant mis voile le 31 Décembre 1687 de Goeree (Delftshaven). La Flute mesurait 131 pieds de long, 31 pieds de large et 13.75 pieds de profondeur. A bord, un équipage de 155 à 172 hommes pour 22 passagers. Le trois-mâts devait arriver directement dans la baie du Cap, mais après des dégâts subis par le navire à la suite d’une grosse tempête, le capitaine Frans Villerius fut obligé de jeter l’ancre dans la baie de Saldanha, à environ 120kms du Cap. Le Capitaine envoya alors un message par un coursier Khoi (Hottentot) au gouverneur du Cap Simon van der SteL Le côtre Jupiter (en anglais cutter – qui serait maintenant l’équivalent d’un garde côte) fut alors envoyé à Saldanha pour secourir les passagers échoués.
Une réplique du Voorschoten
Il y avait à bord 192 passagers dont les Huguenots suivant :
Charles Marais (1640-1689) originaire d’ Ile-de-France
Catherine Taboureux (1642-1729) originaire d’Ile-de-France
Claude Marais (1662-1729) originaire d’ Ile-de-France
Charles Marais (1668-1711) originaire d’Ile-de-France
Isaac Marais (1677) originaire d’Ile-de-France
Marie -Madeleine Marais (1682-1716) originaire d’Ile-de-France
Philippe Fouché (1657-1708) originaire de l’Orléanais
Anne Souchay (1659-1708) originaire de l’Orléanais
Anne Fouché (1681-1713) originaire de l’Orléanais
Esther Fouché (1683-1689) originaire de l’Orléanais
Jacques Fouché (1685-1689) originaire de ‘Orléanais
Gaspard Fouché (1667-1688) originaire de l’Orléanais
Jacques Pienaar (1665-1712) originaire d’Ile-de-France
Esther Fouché (1668-1697) originaire de l’Orléanais
Gidéon Malherbe (1663-1713) originaire de Normandie
Marié Grillon (1670-1735) originaire de l’Orléanais
Etienne Bruwer (1665-1759) originaire de l’Orléanais
Gabriël le Roux (1669-1711) originaire de l’Orléanais
Jean le Roux (1667-1711) originaire de l’Orléanais
Pierre Sabatier (né en 1665) originaire de Champagne. Retourné en Europe après 1700.
Jean Machepaste (1662-1689) originaire de l’Orléanais
Paul Godefroy (1665-1699) originaire de l’Orléanais
Marguerite Basché (1665-1688)
Les frères Jean et Gabriel Roux étaient cousins au deuxième degré avec Philippe Foucher. Philippe Foucher et Etienne Bruere étaient également cousins. Anne Souchay était la sœur d’une des belles sœurs des frères Roux. Ils sont tous devenus des fondateurs des lignes familiales d’Afrique du Sud.
(A suivre)
Sources :
‘’ The French Refugees at the Cape ‘’ by Colin Graham Botha (of the Cape Archives)
second edition 1921.
‘’French speakers at the Cape in the first hundred years of Dutch East India Company rule : the European background ‘’ par Boucher, M. (Maurice), 1922-1987; Hiddingh-Currie Fund
‘’ Ces Francais qui ont fait l’Afrique du Sud « par Bernard Lugan Edition Bartillat ( en partie sur Gallica) Collection Gestes 1996
‘’The Huguenots of South Africa 1688 – 1988’’ by Pieter Coertzen publié par The Huguenot Society of South Africa. 1994
Wikipédia
Musée virtuel du protestantisme
http://www.capetown.at/heritage/history/explorers_merchants.htm
Les Huguenots Français d’Afrique du Sud – Annette Keaney 2017