Q comme Quenouille
J’ai commencé ce petit billet avec dans la tête un petit pied de nez à un de mes ancêtres masculins. D’après la légende familiale, l’ancêtre Loustalet de Maubourguet, dépité que son épouse ait produit une deuxième fille, avait déposé une quenouille au milieu de l’escalier montant vers les chambres, signifiant ainsi qu’il n’avait aucune intention de retrouver mon arrière- arrière- grand-mère au lit. Est-ce vrai ? Qui sait ? Etait-ce lui ou un autre homme de la famille, manquant visiblement de délicatesse.
En mettant mon nez dans l’histoire de la quenouille, je me suis retrouvée noyée dans un immense flot d’information, captivant et dont je donne ci-dessous seulement quelques éléments. Il faudrait beaucoup plus de temps pour faire des fouilles littéraires sur le sujet.
Selon Wikipédia
‘’Faisait quenoille (1179) en ancien français, issu du bas latin conucula [1], dissimilation de colucula, diminutif de colus (« quenouille »).
Tige de bois ou d’osier qui peut être décorée, la quenouille sert à maintenir et stocker les fibres qui ne sont pas encore filées, afin qu’elles ne s’emmêlent pas et qu’il soit facile de les utiliser. Les fibres sont enroulées autour de la quenouille et maintenues en place à l’aide d’un ruban’’
‘’La quenouille s’utilise pour filer le lin, le chanvre, la laine, soit avec un rouet et elle est alors placée tout près de a bobine, soit avec un fuseau, dans ce cas on la tient sous un bras et on maintient le fuseau de l’autre main.
(Sainte Marguerite filant au pré, Livres d’heures d’Etienne Chevalier.)
Elle était depuis l’Antiquité le symbole d’un travail exclusivement féminin. Un homme filant, tenant une quenouille, était considéré comme le comble de l’humiliation : ainsi l’histoire d’Hercule–Héraclès, filant aux pieds d’Omphale. L’expression « tomber en quenouille » signifie, pour un bien, d’échoir à une femme, avec une connotation péjorative.
La quenouille a une grande valeur symbolique de la féminité mais aussi du temps. La quenouille est l’attribut de la déesse germanique Perchta, puis de plusieurs reines Berthe, enfin de saintes des Églises catholique et orthodoxe, notamment celles qui étaient bergères. Elle est aussi l’attribut des 3 fileuses du temps présentes dans la mythologie d’origine indo-européenne (grecque, scandinave et celte…).’’
Dans le livre ‘’ Métiers Oubliés’’ de John Seymour (Editions Chêne), au chapitre Filage et Tissage on peut lire page 179 ‘’ Quand il a été filé, le lin est prêt à être tisse sur un métier comme toute autre sorte de fil. Autrefois, chaque ferme qui pouvait cultiver le lin ne s’en privait pas, chaque fileuse le filait sur son rouet et toute la maisonnée passait une bonne partie de l’année à le préparer. Une fois par an, le tisseur ambulant venait à la ferme avec son métier et tissait pour toute la famille ‘’.
Les Évangiles des quenouilles, œuvre du XVe siècle, est un recueil humoristique de recettes de bonne femme traditionnelles et d’anecdotes.
‘’Les Évangiles des quenouilles (ou Les evvangiles des queneules ; Les evvangiles des quenoilles) est un recueil de contes médiévaux enchâssés rédigés par Fouquart de Cambray, Duval Antoine, Jean d’Arras. Ils furent écrits en langue d’oïl et en picard et publiés à Bruges chez Colart Mansion en 1480. Ce recueil constitue une source ethnologique et historiographique pour l’étude du folklore médiéval européen. Le récit raconte les propos de six femmes dites « sages doctoresses et inventeresses » qui se retrouvent à l’occasion de 6 veillées nocturnes. Elles abordent tour à tour divers sujets de discussion comme les maladies, les remèdes, les recettes, les dictons, les conseils et enfin les interdits de la vie quotidienne. L’ouvrage connut un grand succès tout au long du XVIe siècle’’.
‘’ Si vous voyez un chat assis sur une fenêtre au soleil se lécher le derrière et lever sa patte pour la passer au-dessus de l’oreille, alors ne doutez pas qu’il pleuve ce jour-là.’’
Des évangiles, j’ai atterri sur le Livre ‘’ Jacquard’’ de Lamartine, une biographie écrite en 1864.
La quenouille nourrissait et consolait la moitié du genre humain : les femmes filaient dans les campagnes depuis le berceau jusqu’au tombeau. — (Alphonse de Lamartine, Jacquard)
Dans ‘’Les visages de la Mélancolie, volume 1 ’’ Brigitte Cassirame évoque les symboles et les mythes de la quenouille et du fuseau dans les contes respectifs de Griseldis et de la Belle au Bois Dormant. Le paragraphe sur le mythe des ‘’ Princesses-Fileuses ‘’ est particulièrement intéressant. Le livre est disponible en lecture sur Google Books.
Sources
Wikipédia
Gallica
Les Evangiles des Quenouilles
Chantilly, Bibliothèque du Château, 654, v. 1470 (C)
Alphonse de Lamartine : Jacquard (1864)
Métiers Oublies – John Seymour – Editions Chêne
Brigitte Cassirame – Visages de la Melancolie – Volume1