J comme Jacques Auber(T) dit L’Almanach
(Le T disparaitra dans les générations suivantes)
Que pense-t-il Jacques en ce 5 mai 1689 alors que les côtes de Bretagne s’éloignent, et que bientôt il n’aura de Port Louis que des souvenirs qui s’estomperont avec les années. Comment et pourquoi a –t-il décidé de s’embarquer pour l’Ile Bourbon. A-t-il été recruté par les rabatteurs de La Marine, des Compagnies de Commerce et des marchands qui arpentent les ports en quête de ‘’colons français pour développer le commerce et maintenir le contrôle des zones stratégiques au nom de la France’’ ? Rêvait-il d’un monde nouveau et d’aventures ? Ou était-il poussé par la faim, le froid et la misère ?
Il faut dire que l’hiver 1689 est froid, très froid. Le 1er Janvier 1689, on constate des crues et des inondations à Saumur dans le Maine et Loire. Le 13 Janvier la température chute à -14.9 à Paris. Le printemps qui suit n’est pas chaud et le 30 mai, quand Jacques navigue déjà depuis presqu’un mois, la température dépasse à peine 12 degrés à Paris.
Le luxe, les lumières, l’or et les richesses étincèlent depuis Versailles, mais dans le reste du Royaume , c’est bien différent.
‘’Le Grand Siècle du Roi Soleil, fut sans doute, entre tous, et dans toute l’histoire du royaume de France, le siècle des famines des épidémies de la grande misère du peuple des campagnes. Pour ajouter encore au poids des charges fiscales qui écrasaient la masse populaire, des saisons trop souvent rigoureuses vinrent gâter si ce n’est anéantir les récoltes’’
D’après L’historien Lièvre “Il (le paysan) vivait tant bien que mal dans les années ordinaires mais comme il ne pouvait rien mettre de côté il suffisait d’une mauvaise récolte pour le jeter dans la plus profonde misère. Le paysan, dès lors, ne payait ni impôts, ni fermages et très souvent, après avoir vendu ses meubles, quittait son foyer pour mendier. Le propriétaire qui ne tirait plus de revenu de ses biens ruraux, devait à son tour restreindre sa dépenses et la gêne se répercutait ainsi du bas en haut à tous les étages”.
De plus les guerres font rage sur le territoire, y compris les guerres de religion.
Le 17 Octobre 1685 l’Édit de Nantes est révoqué (on verra les premiers Huguenots arriver en Afrique du Sud en 1688), le 11 Décembre 1688 L’Allemagne déclare la guerre à la France, le 17 Mai 1689 L’Angleterre à son tour déclare la guerre à la France
Donc Jacques , menuisier de son état, né le 15 septembre 1665 à Corzé (Maine-et-Loire), fils de Noël AUBERT et Jacquine du PORT (mariés le 9 mai 1657 à Corzé) s’embarque à Port Louis sur le Saint Jean Baptiste, navire de 50 tonneaux, qui arrive à Bourbon le 31 Décembre de la même année et s’écrase dans la Baie de Saint-Paul, près de la Rivière des Galets. Le navire transportait une vingtaine d’immigrants français, presque tous des artisans. (Bénard-Monge, Dict. du Peuplement) Sur le même bateau, Henry Habert de Vauboulon, Gouverneur de Bourbon.
Il épouse Anne LAUNAY (1680-1716) le 27 juillet 1692 à St Paul avec laquelle il aura au moins 3 enfants (sa descendance portera le nom d’AUBER).
Employé au service de la Compagnie des Indes, il est libéré de sa charge lorsque le sinistre gouverneur Vauboulon est jeté en prison par des conjurés (histoire à raconter dans un autre chapitre). Il s’engage alors dans la Milice puis devient Capitaine du quartier de Saint-Paul en 1703,
‘’ C’est chez lui que réside le Gouverneur lorsqu’il vient à Saint Paul. C’est également chez lui que logent les capitaines des vaisseaux relâchant en rade de Saint Paul”.
Jacques Auber élève des moutons à Saint Paul, d’autres à Saint Gilles (Le Boucan du Canot) et tous les animaux habituellement élevés alors à Bourbon. Sa fortune est estimée a 2000 écus.’’(L’épopée des cinq cents premiers Réunionnais – Jacques Bénard)
‘’Il lui revient d’avoir acclimaté dans l’île dattiers et tamariniers. C’est en sa compagnie que l’un des directeurs de la Compagnie des Indes, d’Hardencourt, aurait découvert les premiers caféiers indigènes de Bourbon. C’est à Auber que fut confié le soin de tenter d’acclimater dans l’île, bien avant Pierre Poivre, les caféiers arabes, le poivre, et la cannelle. Il tenta sans succès de greffer les oliviers sauvages qu’il trouva dans les hauts. Il cultiva également la vigne, et faisait son propre vin. (Bénard-Monge, Dict. du peuplement, p.73)’’
La Culture du Café – Aquarelle attribuée à JJ Patu De Rosemont
Début du XIXe siècle (Paris, Musée national des arts d’Afrique et d’Océanie)
Desforges-Boucher (Gouverneur de Bourbon) dit de lui :
” Réussit admirablement bien tout ce qu’il entreprend. Honnête homme, vivant avec la dernière régularité. Grand politique, conduisant avec une sagesse admirable tous les habitants de Saint-Paul, dont il est le Capitaine de quartier. Homme de bonne conversation, sçavant mesme dans l’histoire. Elevant ses enfants avec toute léducation dont il est capable, De le derniere integrite a légard de ses Noirs. Il est le seul de son espece dans líle et ol ný a point qui légale en capacite, en probite et en sagesse.
Jacques Auber décède LE 19 Avril 1745.
Sources :
Autour d’Ecuras. Journal d’Histoire locale, monuments, folklore
Par Mme Fils Dumas-Delage. ISSN : 1153-0014. Tous droits réservés
No 8, Aout 1991
https://www.histoire-genealogie.com/Les-Francais-en-quete-du-Nouveau?lang=fr
Bénard-Monge, Dict. du peuplement
L’épopée des cinq cents premiers Réunionnais – Jacques Bénard
Registres 49110 Corzé – http://www.archinoe.fr/cg49v2/registre.php – registre : 1640-1668, vue : 235/257